samedi 23 juillet 2011

La fumée qui gronde de Phillippe Zaouati


Le livre :

La fumée qui gronde de Philippe Zaouati, Arhsens Editions, 208 pages, 17 €


Le pitch :

Face à une crise majeure, il est rassurant et confortable de pointer du doigt un responsable. Inquiète du scandale des subprimes et de la déroute financière qui s ensuivit, ulcérée par la découverte du jeu dangereux joué par Jérôme Kerviel et l escroquerie de Bernard Madoff, la société désigna dans son infinie sagesse le coupable du désastre : le Banquier était devenu « l homme à abattre », sans distinction de rôle ni de degré d implication, du simple employé aux patrons, filous ou non. Que se passe-t-il dans la tête d un golden boy porté au pinacle pendant deux décennies, considéré comme l exemple même de la réussite sociale, et que l on accuse soudain de tous les maux jusqu à se réjouir de sa chute ? Que reste-t-il à un homme qui a construit son existence sur la domination, l argent, l apparence, et qui se retrouve du jour au lendemain humilié, jeté à la porte devant les caméras de télévision avec une boîte en carton dans les bras ? Face à la débâcle de sa vie, Emmanuel est contraint de se poser des questions qui ne l ont jamais effleuré auparavant Il se surprend à mesurer le prix de ses sacrifices et de ses renoncements. A-t-il choisi la bonne voie ? Est-il heureux ? L issue de cette course folle aux profits et au pouvoir n était-elle pas fatale ? Et surtout : que faire maintenant ? À la crise financière fait écho la sienne, les doutes existentiels de la quarantaine. Le choc sera-t-il salutaire ? Tourné vers son passé pour y deviner ce que sera son avenir, il cherche les réponses dans une fuite improvisée au goût de sauve-qui-peut.


Ce que j'en ai pensé :

La crise économique, on en a beaucoup parlé. Maintenant, c'est un peu plus calme sur les marchés, du moins en apparence, mais que celui ou celle qui a un niveau de vie modeste ou moyen vienne me dire que la crise est terminée pour tout le monde !!! Je crois que je m'empresserai de lui demander sur quelle planète il ou elle vit… Ou alors si, il ou elle détient des trucs et astuces miraculeux ! Ben oui, moi aussi j'aimerai vivre un peu plus largement et ne pas croire que la fin du mois commence le 15 !

Les milieux de la finance, je n'y comprends rien alors que pourtant ils ont impact sur mon existence quotidienne. J'ai donc eu de la chance quand on m'a proposé de combler mes lacunes à travers la lecture de ce roman signé par Philippe Zaouati. Car oui, il s'agit de fiction (?), mais celle-ci n'est pas forcément dénuée de bon sens, ni d'informations pertinentes.

Emmanuel va être notre guide durant ce récit :  bel homme, divorcé, la quarantaine avec un situation professionnelle plus qu'enviable.
On le rejoint au moment où il a quitté son emploi chez Lehman Brothers. Enfin quand je dis quitté, ce n'est pas volontairement, c'est par la force des choses, des évènements. La chute de la banque Lehman Brothers avait été le premier séisme retentissant, souvenez-vous. Ces cadres qui étaient sur le trottoir avec leur petit carton sous le bras… Un géant de la planète finance s'écroulait, les répliques allaient être presque aussi sévères.
Comme toutes autres catastrophes du même types, il y avait bien eu quelques secousses annonciatrices, mais tout le monde pensait que cela passerait. Seulement voilà, cette fois-ci cela a cassé ! C'est tout un monde qui s'est effondré.
Je pourrai dire que pour ma part, cela ne m'a guère plus étonné que cela car pour le peu que j'y comprenais, le monde des marchés, de la Bourse ne reposait sur rien de solide. Pire, cela n'avait aucun sens, aucune valeur réelle et donc c'était du vent. Des fondations bien peu solides ! Cependant, force est de constaté comme Emmanuel que ce vent a soufflé en tempête et a fait bien des victimes.

Quand on vous dit que l'argent ne fait pas le bonheur, ce n'est pas seulement une expression. Il est certain que ne pas en manquer, simplifie bien la vie quotidienne, surtout dans nos contrées, mais avoir un job qui rapporte gros, voir très gros n'est pas le sésame pour obtenir une vie privée épanouie. Emmanuel souffre et il ne cherche pas à se voiler la face non plus : son fils unique lui manque depuis son divorce. Tout est devenu souffrance quand il s'agit de le quitter lors de ses visites.
Moralité ? Les golden boys ont aussi un coeur !!!!

L'ironie du sort semble vouloir se rappeler aux bons souvenirs d'Emmanuel avec la venue d'un ami de jeunesse à Londres, juste après la chute de Lehman Brothers.
Moralité ? Le golden boy ne nait pas forcément comme on le pense (non pas dans une salle de vente de la Bourse !!!). Tel un papillon de nuit, il se laisse attirer par les fastes de l'argent, les lumières éblouissantes de la réussite sociale et les strass des soirées en VIP, mais c'est peut-être pour mieux se griller les ailes ensuite… Il a oublié ses principes d'étudiant, de jeune homme idéaliste…

Londres, New-york, Cancùn, Marseille et Livingstone, cinq villes, cinq cités importantes dans la vie d'Emmanuel, mais pas forcément le même poids dans l'économie mondiale. Leur point commun, c'est donc le passage de notre guide dans ces lieux à différents moment de sa vie : avant, pendant et après la crise. Et oui, si le golden boy possède un coeur, il a aussi un passé, un présent et même un avenir. C'est un être de chair et de sang, même on a tout fait pour nous les présenter (les golden boys) comme des Dieux ou des apprentis sorciers.
Oui Emmanuel a pu être choqué aussi par les attentats du 11 septembre 2001. N'oublions pas, il a un coeur ! Cependant, il ne les perçoit pas tout à fait comme nous. Il y voit en prime la première pierre lancée pour abattre son monde, son univers et par ricochet, le nôtre également.
Mais, tel un phénix, le monde de la finance renait de ses cendres avec assez peu de mémoire et avec nos sous. Difficile d'oublier l'ivresse du pouvoir même si cela peut vous tuer. La vie, la mort sont trop intimement liées, c'est la loi de la jungle et les plus faibles sont condamnés… Comme toujours.

Un roman a découvrir même si comme moi vous ne suivez pas assidument l'évolution du CAC40, vous en apprendrez toujours un peu plus sur ce monde de l'argent roi qui nous tient qu'on le veuille ou non.
Une lecture facile car le style est fluide (pas trop de termes techniques, mais des images bien pensées pour les néophytes). C'est le parcours de cet homme qui traverse la tourmente au coeur du cyclone. C'est donc un récit financier, mais avec l'homme comme monnaie d'échange.

Et s'il fallait mettre une note : 14 / 20



Merci aux éditions arHsens et à Philippe Zaouati pour cette découverte.



Bonus :

La biographie de l'auteur :

Philippe Zaouati est banquier de profession. Osons le mot : c’est quasiment un golden boy. Élevé au biberon des mathématiques, des statistiques, de l'économie et de la théorie financière, il a gravi les échelons du monde de la gestion d’actifs jusqu’à devenir cadre dirigeant d’une grande banque française. Un monde où il tente de répondre à la question : comment gérer au mieux l’argent des autres ?

Pour soigner le virus de l’écriture qui le taraude depuis toujours – depuis les poésies qu’il déposait dans la boîte à idées de sa classe de CM2 de la rue Peyssonel à Marseille –, il commence par écrire des livres techniques, encore remplis de chiffres et de formules, même s’il y instille autant que possible des réflexions sur son métier.

La crise financière est pour lui un déclic, une véritable remise en cause. Ses enfants lui posent des questions auxquelles il a bien du mal à répondre. Est-il responsable de ce qui arrive ? Il n’abandonne pas pour autant le bateau de la finance qui tangue, il essaie au contraire de l’aider à prendre un nouveau cap. Il écrit alors un ouvrage prônant une finance plus « responsable ».

Pourtant, cet ouvrage se révèle encore trop prosaïque pour parvenir à satisfaire son envie de décortiquer les liens entre une profession qui a éveillé beaucoup de fantasmes et les hommes qui la pratique. Il sait bien que seule la fiction lui donnera la liberté d’écrire ce qu’il a vraiment au fond de ses pensées. Oubliant chiffres et formules, il se lance enfin dans l’écriture d’un roman. Des heures glanées le soir ou le week-end, après de longues journées de travail dans un univers en crise, pour donner vie à des personnages. Petit à petit, tel un dialogue entre les évènements extérieurs et les démons internes de son protagoniste central, La Fumée qui gronde voit le jour. Philippe est-il guéri pour autant ? Certainement pas. Le virus est toujours là... sans doute plus fort que jamais.

Il a publié chez arHsens La Fumée qui gronde.

Autres publications :
Investir responsable, éditions Lignes de repères, 2009 ; La Gestion quantitative, éditions Economica, 1995

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